Il y eut de remarquables reines ; mais avec cette nuance que les moyens de diplomatie et de persuasion conviennent mieux à la femme que les manœuvres de guerre. A elles la connaissance des hommes et des femmes, à l’homme le maniement de la nécessité extérieure.
Alain – Propos (Le Génie féminin, 10 août 1933) A lire ici.
Les Primaires du parti socialiste ont été l’occasion d’observer qu’il y a des questions qu’on ne se pose plus aujourd’hui, comme celle de la compétence féminine dans la vie politique : l’époque où l’on croyait que les femmes ne pourraient gouverner correctement un grand pays, a moins de féminiser la politique ou de se viriliser elles-mêmes est révolue (je veux le croire du moins). (1)
Je ne suis bien sûr pas plus compétent que n’importe qui pour évoquer les raisons de ce changement d’optique, et encore moins pour en juger les conséquences.
Toutefois, quand on lit ce Propos d’Alain, on voit bien clairement ce qui a changé. Pour lui, la distinction entre l’homme et la femme, et la ligne de démarcation qui doit séparer les fonctions attribuées à chacun dans la famille et la société doit se trouver dans la nature, et peut se lire facilement dans un passé lointain, dans ce qu’il nomme « les fonctions sauvages des deux sexes. » On croirait lire Rousseau.
On me dira : pourquoi pas ? Après tout n’y a-t-il pas des limites à l’intérieur desquelles la nature nous cantonne ? Des rôles qu’on ne peut rejeter sans malheur ? Des fonctions qu’on ne peut prendre sans se dénaturer (comme Hercule filant aux pieds d’Omphale) ?
On critique ce point de vue en énumérant les variantes opérées dans la répartition des rôles masculins et féminins par les différentes civilisations. Je ne m’y attarderai pas ; par contre je dirai plutôt que l’histoire – et même l’histoire très récente – nous a montré que les femmes étaient capables d’affronter des situations qui leur était jusque-là interdites non pas en singeant les hommes (comme voudrait nous le faire croire la chanson de Sardou évoquée plus haut), mais en inventant des attitudes, des solutions, des procédés qui ne ressemblent ni à ce qu’auraient fait les hommes, ni à ce qu’auraient fait leurs mère ou leurs grand-mères.
S’il y a quelque chose de naturel dans l’homme, c’est bien cela : l’homme (= l’être humain) est un animal qui a chaque génération doit inventer ce qu’il va être. Mais là, ce n’est plus Alain ; c’est Sartre.
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(1) Les amateurs n’ont pas oublié la chanson de Michel Sardou : la voici dans la version1980 et avec, en prime, la version 2010
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