Un homme qui déteste les enfants et les chiens ne peut pas être tout à fait mauvais.
W.C. Fields
Etonnant W.C. Fields ! Supposez qu’il ait dit : «Un homme qui déteste les enfants ne peut pas être tout à fait mauvais ». Bon, on comprend. Qui donc n’a pas été excédé par le sale gosse qui court partout dans le train et qui pousse des cris à vous faire péter le tympan parce qu’il n’a pas eu ses bonbons ?
Supposez qu’il ait dit : « Un homme qui déteste les chiens ne peut pas être tout à fait mauvais ». C’est simple, nous avons tous été envahis par le désir de génocider l’espèce après avoir glissé dans leurs déjections.
Mais il a dit : « Un homme qui déteste les enfants et les chiens ne peut pas être tout à fait mauvais ». Quand on n’aime pas les enfants et les chiens, qu’est-ce qu’on n’aime pas ? C’est quoi ce composé ?
Je propose : c’est la famille qui est visée. Avec le père qui rempli la voiture (si possible : le 4x4) pour le pique-nique, avec la mère qui apporte le panier rempli pour le déjeuner, avec le chien qui gambade sur la pelouse poursuivant le petit qui court après le ballon. Pouah ! Vision d’horreur ! Existence étriquée, petits bonheurs, grande suffisance de tous ceux qui se donnent ainsi en modèle pour leurs voisins envieux. Les enfants et les chiens ne font que représenter cette vie familiale, anesthésiante et indolore, idéale pour illustrer la couverture des magasines féminins.
Vous en penserez ce que vous voudrez. Mais je me rappelle que Freud disait que les hommes devaient renoncer à leur désir d’aventure parce que les mères les retenaient au foyer. La citation de Fields est en tout cas dans cette logique ; choisir la vie familiale, c’est renoncer à une autre vie, et tout le monde ne consent pas à ce renoncement de gaîté de cœur.
- Allons, allons, soyez honnête; quoique vous fassiez, il faudra renoncer à quelque chose. « Omnis determinatio est negatio »…
Merci Spinoza !
3 comments:
Pouvez-vous refaire le commentaire, avec cette variante de la citation : "Une femme qui déteste les enfants et les chiens ne peut pas être tout à fait mauvaise." ? Pensez-vous comme Freud que ce sont les femmes qui retiennent les hommes au foyer? J'aurais tendance à penser l'inverse...
Peut-être que ce sont effectivement les hommes qui ne veulent plus sortir du foyer (maternel). Peut-être aussi était-ce déjà du temps où Freud écrivait cei (Malaise dans la culture - 1929) un prétexte pour excuser le manque d'audace de certains messieurs.
Quant à dire que les hommes empêchent les femmes de faire carrière au nom de leur rôle de mère, c'était déjà le cheval de bataille du féminisme des années 70, mais alors il s'agissait de savoir si l'émancipation féminine passait par le travail salarié. Vous savez comme moi que le problème aujourd'hui reste posé : quelle émancipation pour la femme qui fait sa double journée: au bureau puis à la maison. Mais là aussi le modèle évolue, et l'égalité homme-femme dans les tâches domestiques fait son chemin.
Quant à dire "une femme qui déteste les enfants etc..", personnellement je ne fais bien sûr pas de différence . En revanche, lorsque la femme qui vient d'accoucher ne ressent aucun sentiment pour son bébé, on dit alors qu'elle fait une dépression "post partum". Preuve que la culture maintien une assymétrie sur ce plan (voir le livre d'Elisabeth Badinter sur l'instinct maternel : l'amour en plus).
Conclusion : c'est quant même une citation qui a un certain écho, car j'ai lu quelque part (mais où???) qu'un philosophe "américain" (mais le quel???) avait écrit : "La liberté, c'est quand les enfants sont partis et que le chien est mort."
"L'amour en plus" est sur ma liste des 10 000 livres (et des poussières) à lire avant la fin de l'année... depuis quelques années! Pour avoir eu quelques échos de la thèse de Badinter, je ne suis pas entièrement d'accord avec elle sur ce point. Mais bien sûr, il ne faut jamais fonder son opinion sur des ouï-dire, il faudra donc que j'aille voir le texte de plus près.
Quant à la double journée, je ne parlais pas forcément du travail salarié (encore que ce soit la clef de l'indépendance financière si l'on n'est pas rentière...). Héloïse a traîné des pieds et argumenté jusqu'au bout pour ne pas épouser Abélard. Pour elle comme pour lui, entrer dans la conjugalité signifiait abandonner toute prétention à l'étude intellectuelle. Ces deux-là on sauvé du mariage leur ardente spiritualité en s'unissant "en Dieu", chacun dans sa retraite monacale... Heureusement qu'il y a des couvents!!
Post a Comment