Complexé Cyrano. Obsédé par son nez. Au point d’être dans la dénégation du complexe.
Voyez la « Tirade du nez » :
Je me les sers (1) moi-même, avec assez de verve,
Mais je ne permets pas qu'un autre me les serve.
Combien sommes-nous à être comme Cyrano persuadés que notre corps est difforme et que c’est cette difformité qui est repérée par tous ceux qui nous voient, et même qu’on ne voit que ça. Les cliniques de chirurgie esthétique font fortune avec ça, et les clients qui se font opérer espèrent bien que tout le monde va s’apercevoir du résultat.
Tout vient de cet étrange pouvoir des autres : ils n’ont pas à parler, par leur regard ils nous jugent sans un mot. Dans l’Etre et le néant, Sartre parle de ce pouvoir. Il suggère l’homme qui regarde par le trou de la serrure ; un pas résonne dans le couloir ; « On » l’a surpris dans cette attitude : c’est la découverte de la honte. Mais qu’est-ce qui me dit que l’autre me juge ? Peut-être qu’il va me dire : « Pousse-toi de là, que je regarde aussi. ». Ainsi, avant de penser que j’ai un gros nez, les autres voient que j’ai un nez. La belle affaire ! Un nez, c’est un nez, et rien de plus.
Bref, le pouvoir des autres sur moi, c’est le pouvoir que je leur confère. D’ailleurs ce pouvoir peut être négatif, mais il peut être aussi positif, comme dans la flatterie. Mais c’est le même mécanisme
Faisons comme Marlène Dietrich ; quand on vantait le galbe de ses jambes elle disait : « Voyez-vous, elles me servent d’abord à marcher. »
(1) « Je me les sers... » : il s’agit des « folles plaisanteries » qui constituent la tirade du nez
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