Bossuet
Que voilà un sage précepte ! Pascal lui-même le disait : le bonheur véritable consiste à vivre dans le présent sans prendre garde à l’avenir (1). Laissons-le à la Providence : si Dieu le veut…inch Allah…
Oui, mais plus prudent, Pascal disait qu’il fallait prendre appui sur le passé pour agir dans le présent. Alors, comment comprendre le rejet du passé par Bossuet ?
Posons la question différemment : que faut-il oublier du passé si nous voulons vivre pleinement le présent (supposons que ce soit le propos de Bossuet) ?
Si vous me permettez un instant de me mettre à la place de Bossuet - et si donc je devais faire un sermon sur ce thème - je dirais ceci.
- la grâce divine, succédant à un repentir authentique, est un véritable bain de jouvence, elle nous lave de nos fautes. Le passé est oublié parce qu’il est détruit, effacé. Seul doit rester le souvenir de la faillibilité humaine. Mais nul repentir pour ce qui a été pardonné.
L’oubli du passé est donc l’oubli des fautes passées. Et nos triomphes passés ? Que faut-il en faire ? Les oublier également ?
Hé bien oui, oublions-les et allègrement encore ! Déjà, sur la plan historique, parce qu’on ne compte plus les guerres et les massacres engendrés par la prétention des puissances à faire valoir des droits acquis autre fois, l’épée à la main sur d’autres peuples (2). Mais aussi, sur le plan individuel, parce que la vie est faite de ces arrachements à soi-même, du refus de l’enkystement par la répétition du passé, de cet engluement dans l’en-soi pour parler comme Sartre, pour qui le concept de la viscosité, illustrait à merveille ce rapport pernicieux au passé.
Ne pas avoir la prétention de gouverner l’avenir. Mais avoir celle de créer un présent neuf.
Merci Bossuet !
(1) Voir Post du 17 avril 2006
(2) Voir la citation de Paul Valéry : «L'histoire est le produit le plus dangereux que la chimie de l'intellectuel ait élaboré. » Voir la suite : Post du 5 avril 2006
3 comments:
"L'oubli du passé et donc l'oubli des fautes passées."
Cela me fait penser à Kundera, lorsqu'il écrit dans "La plaisanterie" :
"tout sera oublié et rien ne sera réparé. Le rôle de la réparation (et par la vengeance et par le pardon) sera tenu par l'oubli. Personne ne réparera les torts commis, mais tous les torts seront oubliés"
Je savais bien que mes cours d'histoires ne servaient à rien.
Allons donc détruire nos monuments aux morts, et brulons nos manuels d'histoires sur ces autels de poussières !
Belle citation de Kundera : si l'on ne peut ni réparer ni pardonner, l'oubli reste la seule issue
- C'est pour cela que l'Histoire avec un grand H, celle des monuments aux morts précisément et celle de la célébration de loa victoire des orangistes sur les catholiques en Irlande il y a 4 siècles, est effectivement dangereuse.
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