Il y a la nature qui est la chose que Dieu fait immédiatement et il y a l'art qui est la chose que Dieu fait à travers le cerveau de l'homme.
Victor Hugo – Océan
Les artistes, lieutenants de Dieu sur terre, poursuivant Son Œuvre pendant qu’Il se repose ?
Non, mais pour qui il se prend, Victor Hugo ? N’aurait-il pas pris la grosse tête par hasard ?
Et puis encore, les artistes : par n’importe les quels. Pas les danseurs, pas les chanteurs, peut-être même pas les musiciens. Car pour être artiste, il faut avoir un cerveau d’artiste. C’est avec ça qu’il va créer l’œuvre divine que l’homme porte en lui : la poésie.
Car on a bien compris que c’est à la création tenant du langage que Victor Hugo pense ; sinon, comment le cerveau serait à lui seul le promoteur de l’œuvre ? La poésie, qu’elle soit poétique au sens restreint ou qu’elle soit création au sens large du terme – donc aussi bien prose – est d’abord de la pensée faite mots.
Laissons de côté la question de savoir du Hugo blasphème ou pas. Laissons même de côté le débat sur la poésie comparée aux autres arts, et supposons que précisément nous ayons affaire aux artistes en général, et à toute forme d’art en particulier. Ce qui importe, c’est de comprendre à quelle expérience renvoie son idée.
Qu’est-ce que c’est que cette expérience vécue comme prolongement de la Création, sinon la création artistique au sens courant, c’est-à-dire ce qu’on éprouve lorsqu’on voit apparaître quelque chose qui n’existe que parce qu’on l’a produit, quelque chose qui n’existait pas avant, et dont on pense que personne d’autre que nous ne l’aurait produit. Cet « objet » que je viens de créer, c’est moi-même pris dans l’étoffe du monde, bon ou mauvais, satisfaisant ou décevant, il est mon représentant. On compare la création artistique ou littéraire à un enfantement : la différence, c’est que l’enfant qu’on met au monde reste à élever. L’œuvre, elle, est achevée : telle elle apparaît, telle elle restera.
Le danger de cette expérience de la création est le narcissisme : que je trouve cette œuvre adorable, parce qu’elle est un peu de moi-même, et c’est la porte ouverte à tous les dérapages, à toutes les médiocrités.
Alors bien sûr quand en plus on se prend pour Dieu en personne…
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