Wednesday, August 12, 2009

Citation du 13 août 2009

C'est le fait d'un ignorant d'accuser les autres de ses propres échecs ; celui qui a commencé de s'instruire s'en accuse soi-même ; celui qui est instruit n'en accuse ni autrui ni soi-même.

Epictète – Le manuel

Le conseil d’Epictète a ceci d’étonnant qu’il finit par suggérer que l’échec n’a pas de cause humaine, que personne – ni moi, ni les autres – n’en est véritablement responsable.

L’échec, ce serait donc toujours la faute à Pas-de-chance ? Moi qui échoue, serais-je né sous une mauvaise étoile ? Et ceux qui réussissent seraient-ils des chanceux, des veinards ?

Pas si évident…

Et d’abord, quel savoir possède celui qui est instruit ?

Sachant qui est Epictète et ce qu’est le stoïcisme, on répondra sans hésiter : celui qui est instruit sait ce qu’est l’ordre nécessaire de la nature, il sait que l’homme lui est soumis comme n’importe quel autre élément naturel – soumis, à l’exception de sa volonté qui peut se retourner contre lui (1).

L’échec n’est que la révélation d’une discordance entre l’ordre de la nature et celui de la volonté : j’échoue parce que j’ai voulu l’impossible.

Résumons-nous : si j’échoue dans ma tentative c’est parce que :

- Soit le contexte a été défavorable, mais comme tout est déterminé dans la nature, il ne pouvait de toute façon en être autrement : personne n’est responsable.

- Soit c’est moi-même qui suis responsable, mais c’est qu’alors j’ai voulu faire ce dont je n’étais pas capable – et certes je peux bien me le reprocher, mais je peux aussi reconnaître que cet échec est une conséquence de ma nature, orgueilleuse ou fantasque qui m’a poussé à m’engager imprudemment : c’est donc aussi une certaine nécessité dont je ne suis pas responsable, puisqu’il n’est pas en mon pouvoir de me changer.

Admettons, me direz-vous ; mais alors quid de la morale ? Nous n’avons plus d’effort à fournir, simplement à dire : compte tenu de ce que je suis, il n’est impossible de m’améliorer – et voilà ?

C’est que le stoïcisme est d’abord une science avant d’être une morale : connaissons la nature et sachons quelles actions elle accepte et les quelles elle rejette. Modelons notre comportement là dessus.

Fort bien… Mais alors plus de conversion morale, plus de valeur à reconnaître, plus d’ascèse de l’être ?

Si, tout de même : nous avons à travailler sur nous-mêmes pour mettre nos désirs à l’unisson de la nature : Sequi naturam.


(1) Il s’agit d’un des aspects de la prohairesis. Voir ici

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