C’est à vous républicains à achever votre ouvrage et à purger la France de tous les jean-foutres qui ont partagé les crimes de ce tyran (=Louis XVI). Ils sont encore en grand nombre, sa femme et sa bougre de race vivent encore : vous n'aurez de repos que lorsqu'ils seront détruits. Petit poisson deviendra gros, prenez-y garde, foutre, la liberté ne tient qu'à un cheveu.
Hebert. Oraison funèbre de Louis Capet, dernier roi des Français, prononcée par le Père Duchesne (le Père Duchesne, n° 212 - janvier 1793)
… foutre, la liberté ne tient qu'à un cheveu. J’ai failli ne retenir que cette fin de citation, et puis je me suis dit que privé de son contexte révolutionnaire, la rhétorique du Père Duchesne risquait de dérouter.
Pourtant sa remarque tient toujours la route : le liberté est un bien si fragile… ne la laisse pas tomber (comme dit la chanson).
Comment en viendrait-on à perdre sa liberté ? Le Père Duchesne est clair : il y a une race de tyrans qu’il suffit d’éteindre pour être tranquille. Mais, tant qu’ils vivront : alors, oui – la liberté sera fragile.
Mais il faut dire que le Père Duchesne, malgré toute la sympathie qu’on a pour lui a une réflexion un peu courte. S’il avait lu La Boétie, il saurait que les tyrans n’ont pas de victimes, ils n’ont que des complices. Les hommes aiment obéir et être asservis, ils sont habités par un désir de servitude voilà ce qui explique la faiblesse des résistances rencontrées par les despotes.
Pourtant, d’autres analyses expliquent la fragilité de la liberté, je les évoque rapidement :
- Rousseau pour qui le peuple ne crie à l’attentat liberticide que quand on s’en prend à sa bourse, ce que les despotes avisés, écrit-il, ne font qu’en dernier.
- Kant, pour qui c’est la paresse et la lâcheté qui explique la soumission à l’autorité.
- Sartre pour qui la liberté est une épreuve parce qu’elle met en jeu notre responsabilité, au point qu’on aime faire comme si notre liberté n’existait pas, afin de reprocher nos déceptions à d’autres plutôt qu’à nous-mêmes.
Et nous ? Ce que nous recherchons comme étant notre liberté n’est-ce pas justement ce qui nous prive de liberté ? La consommation, le désir de sécurité, l’amour du troupeau… Les papys et les mamies qui étaient à Woodstock il y a 40 ans le savent bien : ils n’ont vécu qu’une utopie, qui comme toutes les utopies, ne devait pas durer.
Viva las cadenas, comme clament les autruches dans le film de Louis Buñuel (1)…
(1) Si je ne me trompe pas il s’agit du Fantôme de la liberté
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