Thursday, February 05, 2009

Citation du 6 février 2009

Un état chancelle quand on en ménage les mécontents. Il touche à sa ruine quand on les élève aux premières dignités. (1)

Diderot – Principes de politique des souverains

- Le Général de Gaulle avait crié aux algérois en 1958 : « Je vous ai compris ». Ceux-ci l’avaient acclamé, n’ayant pas compris que cela ne signifiait pas du tout « Je vous approuve ».

De fait De Gaulle n’a pas eu peur de faire encore plus de mécontents.

--> Notre-Président « entend » les manifestations de la rue. Est-ce à dire qu’il va les ménager ?

- Diderot n’y va pas par quatre chemins : ne donnez pas le pouvoir à ceux qui manifestent leur mécontentement dans la rue – ou ailleurs – dit-il.

Mais alors Diderot ne remet-il pas en cause un des fondements de la démocratie ? Car même si on admet que les mécontents ne sont pas forcément les plus nombreux, peut-on admettre que la démocratie laisse sur le bord du chemin certains citoyens ? Quelle serait la valeur du contrat social dans ce cas ?

En réalité, Diderot prend le point de vue du bien public. Lui seul doit être souverain. Or les mécontents sont quand à eux des individus qui défendent des besoins individuels ou corporatistes. Aucune légitimité politique ne peut en sortir.

Alors, bien sûr, quand on voit chaque soir à la télévision les ouvriers licenciés d’une entreprise réclamer que l’Etat la subventionne pour en continuer l’exploitation, est-ce seulement corporatiste ? Quand les mécontents disent : « Nous crevons de misère, secourez nous ! », faut-il refuser de les ménagers ? Et si d’aventure ils prenaient le pouvoir, faudrait-il s’en désoler ?

Lorsque le besoin vital d’un individu se trouve mis en cause, alors son cas est celui de tous. La justice est mise en péril lorsqu’un seul souffre d’injustice : le bien public est alors tout entier incarné dans cet individu.

Ça, Diderot le sait bien sûr. Ce qu’il veut peut-être dire, c’est que le mécontentement n’est pas en même temps ce qui donne la science nécessaire pour changer les choses. Au siècle du despotisme éclairé, on a cru possible de demander au Souverain personnel de trouver les solutions pour soulager le pauvre peuple.

Mais nous, on a eu le Petit père du peuple, le Fürer, le Grand Timonier, etc, etc…


(1) Dignité :

Sens A : Sentiment de la valeur intrinsèque d'une personne ou d'une chose, et qui commande le respect d'autrui.

Sens B : Prérogative (charge, fonction ou titre) acquise par une personne (un groupe de personnes), entraînant le respect et lui conférant un rang éminent dans la société.

Bien évidemment, Diderot prend ici dignité que sens B.

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