Et toute la beauté charnelle de ma femme / N'a que la minceur de la peau.
Thomas Overbury (1581-1613)
Dans le plaisir que nous donne l’amour, dans l’émotion que nous donne la contemplation de la beauté d’une femme, la peau compte pour beaucoup. Qu’est-ce que la beauté d’une femme sinon l’éclat de son teint, le grain de sa peau, la façon dont elle accroche la lumière ?
Mais – et c’est là une source d’étonnement – la peau, c’est bien peu de choses : quelques tout petits millimètres de chair sous la quelle se trouve une viande sans doute fort peu appétissante. On peut même supposer que sous la peau, nous sommes tous pareils, et c’est précisément le propre des racistes de nier une pareille évidence.
Et même, le joli bronzage qui lui confère cet aspect séduisant, ce n’est en réalité que quelques milligrammes de mélanine (1). Pourtant, voyez le soin qu’on met à se faire bronzer dans les cabines UVA : voilà ce qui atteste de l’importance de la peau dans les rapports sociaux.
Nul doute que les moralisateurs en profiteront pour honnir cette vanité (vanitas vanitatis…) qui nous met à genoux devant une si fragile idole.
Et si au contraire nous disions que, oui – la peau est bien peu de chose, mais ce peu est déjà beaucoup. Car, c’est dans le peu de chose que s’épanouit notre jouissance.
L’amour nous dit-on est le contact de deux épidermes. Certes, ça ne veut pas dire qu’il n’y a rien d’autre à chercher au-delà, ailleurs, pour connaître l’autre. Mais ça veut dire au moins que rien ne pourra jamais remplacer ce contact. Et nous le savons bien : évidemment, la photo de la très-chère ne remplacera jamais le bonheur de la serrer dans nos bras, et de sentir le contact de sa peau contre la notre.
Mais encore faut-il que s’établisse le contact entre deux peaux.
Sauf si comme Roland Barthes vous considérez que le langage est comme une peau symbolique : Le langage est une peau : je frotte mon langage contre l'autre – écrit-il (2).
Barthes vous aura prévenu : méfiez-vous des baratineurs !
(1) À ne pas confondre avec la mélamine.
(2) Roland Barthes – Fragments d'un discours amoureux
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