Saturday, November 14, 2009

Citation du 15 novembre 2009

Tout homme tend à devenir machine. Habitude, méthode, maîtrise, enfin - cela veut dire machine.

Paul Valéry – Cahiers I

Eloge de l’habitude 1 –

Tout homme tend à devenir machine. Voilà une affirmation terrifiante, nuancée pourtant par la suite : machine, c’est-à-dire habitude, méthode, maîtrise,

A côté des robots, ces monstres inquiétants, qu’on suppose capables du pire sans états d’âmes parce qu’ils n’ont pas d’âme, voici la part machinale de l’homme.

Valéry place dans l’homme sous le titre de machine tout ce que nous faisons sans n’avoir plus à le penser, à l’organiser ni à le vouloir point par point pour l’effectuer.

- La coordination de nos jambes pour marcher, les mouvements de notre langue pour parler, ceux de notre main pour écrire.

- Mais aussi les doigts du pianiste pour jouer, et le bras du tennisman…

- Et encore le raisonnement d’induction dans la vie quotidienne, le souvenir opportun des opérations à accomplir pour réaliser notre tâche, etc.

Oui, tout cela nous l’avons voulu, nous l’avons organisé, nous l’avons appris. Et puis s’est installée l’automaticité bien faisante qui délivre notre conscience et notre intelligence – voire même notre mémoire – de ces tâches pour leur permettre de se consacrer à des tâches nouvelles.

L’humanité est pétrie et façonnée par ces habitudes, elle est un produit de l’action machinale. Comment expliquer autrement le rôle de la culture, qui, une fois apprise nous permet d’agir et de penser sans avoir à y penser ? Et comment le progrès serait-il possible sans la tradition, là encore source d’action, réactions, pensées machinales ? Du coup, avec Valéry, ce n’est pas tant l’homme qui change d’image que la machine.

Reste qu’à nommer machinales comme le propose Valéry toutes ces actions, toutes ces procédures qui nous permettent de maîtriser non seulement la matière, mais aussi la pensée, nous comprenons que pour être un peu homme, il nous faut aussi inventer et non répéter.

Que ce soit grâce à l’habitude qu’on puisse être libéré pour innover, certes.

Mais reste à innover quand même.

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