Thursday, May 29, 2014

Citation du 30 mai 2014



Epectase – Subs. masc. : L’épectase est, chez les chrétiens, une tension et un progrès de l’homme vers Dieu. Cela désigne aussi, dans un sens familier, le décès pendant l'orgasme (Cf. Le Robert, « Le président Félix Faure est mort en épectase. »).
Article de Wiktionnaire
La vie des mots (Suite)
Epectase : curieuse vie que celle de ce mot ! Passer comme ça de l’élan vers Dieu à la mort orgasmique, ça suppose qu’on saute pardessus un gouffre ! Quel renversement de sens !
o-o-o
Il y a bien des cas de renversement de sens dans l’évolution sémantique d’une langue.
- Ainsi de l’adjectif « énervé » qui signifiait à l’origine « priver de nerf » (1) et qui en est venu à signifier exactement le contraire.
- Ainsi également de l’usage systématique d’un terme pour signifier le contraire de ce qu’il dit en réalité – même quand il existe un mot exact pour cela. Qu’on pense à l’avalanche des dépêches de presse relatant l’implosion de l’UMP suite à la déflagration qui la secoue (2) : en toute rigueur une déflagration fait exploser et non imploser. En revanche il est exact que ça pourrait à terme faire imploser l’UMP, si du coup elle se vidait de ses adhérents et de ses électeurs.
Mais alors, pourquoi un tel usage ? Qu’est-ce qui explique qu’on utilise un mot relativement peu connu de façon inexacte pour remplacer un mot bien connu et exact ?
C’est qu’en parlant, nous cherchons à attirer l’attention de notre interlocuteur, et que pour ça les mots doivent l’éveiller, se faire remarquer, un peu comme si on le tirait pas la manche. Il nous faut du neuf et de l’exotique – et non de ces mots usés comme de vieilles pièces de monnaie qu’on glisse en silence dans la main (Cf. Mallarmé, ici n°2). Imploser, ça attire l’attention alors qu’exploser (en tant que mot) ça passe sans se faire remarquer – même si ça veut dire exactement ce qu’on cherche à signifier.
Moralité :
Tout ça veut dire que le plus important est de se faire écouter – même si on n’a rien à dire.
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(1) En fait il s’agissait du traitement barbare que les romains réservaient aux esclaves fuyards qu’ils reprenaient : ils les estropiaient en leur coupant les tendons (= nerfs) derrière les genoux, les rendant ainsi incapable de se tenir sur leurs jambes
(2) Il s’agit de l’Affaire Bygmalion. Pour ceux qui vivent loin de nos frontières, voir ici.

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