Ohé, saboteur, attention à ton fardeau : dynamite...
On ne peut pas dire que cet hymne à la Résistance soit non violent ! Je sais, ce n’est pas la première fois qu’on pointe la violence contenue dans les hymnes nationaux, depuis le « sang impur » de notre Marseillaise jusqu’au « Deutschland, Deutschland, über alles in der Welt » des Teutons. On dira que chacun de ces hymnes résonne des fureurs de l’histoire, qu’il est modelé par les circonstances dans les quelles il fut composé. Et c’est vrai. Mais voyez la « Complainte du partisan » (1) composée à Londres en 1943 ; c’est beaucoup moins sanguinaire : on y parle surtout des morts qu’il faut remplacer.
Le Chant des partisans développe la thématique du héros ; héros anonyme dont il faut immortaliser la bravoure, le résistant est diamétralement opposé au terroriste qui d’ailleurs est bien souvent le résistant du bord opposé… Les égorgeurs des djebels, les pilotes des avions suicides du 11 septembre aussi sont des résistants pour les militants de leur cause ; et surtout : ce sont des héros.
Car ce qui coince ici c’est que la violence soit non seulement légitimée, mais qu’elle soit en plus héroïque. Or nous avons hérité de la tragédie antique un modèle de héros victime et non tueur. Le héros est celui qui va mourir : en lutte avec des forces qui le dépassent, il ne tire son héroïsme que de sa lutte désespérée, et nullement du succès de celle-ci. Alors, certes, le héros se bat, et il fait des dégâts. C’est normal. Mais nulle part n’est valorisée cette destruction violente, la tradition théâtrale allant jusqu’à en proscrire la représentation : dans les tragédies classiques on ne mourait jamais en scène. Evidemment, la tragédie romantique s’est bien rattrapée : non seulement le héros romantique meurt en scène, mais en plus il commente fort longuement cet évènement !
Alors y aurait il à faire une histoire de la violence héroïque ? « les tueurs à la balle et au couteau » ont fait des émules qui aujourd’hui arborent plutôt des kalachnikovs… Qu’est-ce qu’il y a d’héroïque à tuer des civils désarmés (ou des soldats surpris dans une embuscade) ? Faut-il répondre à cette question ? Je me méfie des réponses, du genre : « le héros est celui qui lutte pour une juste cause », ou bien : « le héros est celui qui affronte l’ogre impérialiste ».
Balle de plomb et langue de bois.
(1) A lire ici
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