L'égoïsme est cette loi de la perspective du sentiment d'après laquelle les choses les plus proches sont les plus grandes et les plus lourdes alors que toutes celles qui s'éloignent diminuent de taille et de poids.
Nietzsche – Le Gai Savoir
Pourquoi dit-on que l’égoïste est celui qui se regarde le nombril, si ce n’est parce que le nombril est cette partie de lui qui est la plus proche de lui-même ?
Nietzsche dit joliment que l’égoïsme et un loi de la perspective sentimentale qui accorde le plus d’importance à ce qui nous touche de plus près – j’entends quand à moi, ce qui nous ressemble ou nous concerne le plus.
Mais il nous dit encore que ce qui nous paraît le plus proche est en même temps le plus grand et le plus lourd. On devine que l’égoïste est handicapé par cet encombrant fardeaux qu’il constitue pour lui-même, un peu comme les danseurs de Zadig au sortir du corridor de la tentation, ce couloir obscur rempli des bijoux et de pierres précieuses (1).
Comme beaucoup, j’ai tendance à me méfier des évaluations à l’emporte-pièce, de ces clés qui ouvrent toutes les serrures. N’empêche que cette phrase de Nietzsche pourrait bien nous être utile si nous l’entendions comme une précaution à prendre.
Elle pourrait dire ça : méfions nous de ce qui nous parait grand et important dans la vie. Avant de consentir à nous en charger, vérifions si par hasard cette importance ne serait pas seulement une pesanteur stérile, quelque chose qui ne vaudrait que par rapport à cet égoïsme que nous rejetons pourtant.
Plus encore : demandons nous ce que nous allons être obligé de laisser sur le bord de la route pour pouvoir charger cet encombrant fardeau.
(1) Voltaire, Zadig – À lire ici, à écouter là – c’est le chapitre 14
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