Tuesday, June 21, 2011

Citation du 21 juin 2011

Un incident technique vient perturber la mise en ligne de mes Post, qui ne peut se faire au jour le jour comme d’habitude. J’espère résoudre la difficulté rapidement afin que la situation redevienne normale.
Avec mes excuses pour le dérangement,
J-P. H.
Je vais te dire un grand secret Le temps c'est toi / Le temps est femme Il a / Besoin qu'on le courtise et qu'on s'asseye / A ses pieds le temps comme une robe à défaire / Le temps comme une chevelure sans fin / Peignée

Aragon – Le grand secret (1942) A lire ici


Le temps est femme… il est comme une robe à défaire … comme une chevelure sans fin peignée.
Les images poétiques ont ceci de particulier, c’est de signifier avant toute interprétation, mais aussi de se prêter à l’interprétation – et puis ceci encore, de permettre de renouveler l’interprétation chaque matin… Le poème est sans fin, et c’est vraiment pour cela qu’on peut dire sans crainte de lui qu’il est une œuvre d’art.
Comme on le sait, je n’ai pas coutume de commenter ici des poèmes qui doivent leur puissance au flux et au reflux de l’imagination, libre de toute règle et de toute norme.
Si je cite aujourd’hui ce poème, c’est pour l’image de la chevelure peignée et repeignée, sans fin, image de la durée telle qu’on l’éprouve aux pieds d’une femme aimée.
On n’évoque en effet pas souvent la chevelure à partir du peigne qui la lisse : comme si ce travail intime devait échapper au spectateur amoureux, comme si cette action était anti-poétique et anti-esthétique. Or, voici qu’Aragon met le peignage au centre de son vers, en pleine lumière.
Pourquoi donc le peignage serait-il une image d’une durée réitérée sans fin ? C’est qu’il est parfois comme une caresse qui de la brosse ou du peigne vient parcourir le cheveu.
On songe le plus souvent à la chevelure féminine comme à une manne offerte à l’amoureux, comme une beauté dédiée à l’admirateur, et jamais comme un plaisir destiné à celle – ou à celui – qui la porte. Comme s’il n’y avait aucune différence entre la chevelure naturelle et la perruque !
Il y a un auto-érotisme du cheveu, une caresse qu’on s’offre et qui sans effort, sans lassitude peut se renouveler indéfiniment.

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