Thursday, June 26, 2014

Citation du 26 juin 2014

Il n'y a sans doute rien de plus émouvant dans une vie d'homme que la découverte fortuite de la perversion à laquelle il est voué.
Michel Tournier – Le Roi des aulnes

Etes-vous un pervers qui s’ignore ?
Troublante citation que celle-ci. Que nous soyons, vous et moi – mais vous surtout ! – sujets à des perversions, déjà : c’est un peu fort ! Mais le pire ce serait qu’en effet nous ne soyons même pas conscients de la perversion à laquelle nous succombons.
Le problème vient de ce que la perversion est un concept qui en porte d’autres dans ses flancs.
            - Concept juridique : le pervers est celui qui impose un rapport sexuel excluant la possibilité de fécondation (1).
            - Concept moral : tendance à faire le mal en détournant un être de sa vraie nature.
            - Concept psychopathologique : traiter autrui comme un objet.
Traiter autrui comme un objet : c’est là que le problème apparait. Certes je suis à tout moment obligé de considérer autrui comme un objet : même le garçon de café à qui je demande de m’apporter ma consommation est, pour moi, et le temps que je suis assis là, un objet. Une machine ferait tout aussi bien l’affaire.
Sauf que lorsque j’agis sous l’effet d’une perversion, je prends du plaisir à commander l’autre, à lui imposer s’il le faut de faire ce qui me fait jouir. Et la perversion véritable suppose que j’aille jusqu’à nier sa réalité humaine de sujet (2), ce qui entraine un mépris qui rejaillit sur la victime comme on le voit fort bien dans le cas des prostituées.
Alors, bien sûr il est fort douteux que je jouisse de l’obéissance du garçon de café. Mais avouons que des circonstances différentes pourraient fort bien être plus ambiguës. Il suffit que la personne soumise à notre autorité soit un peu plus proche de nous, et pour une durée un peu plus longue, comme c’est le cas du personnel que nous commandons comme les secrétaires pour le chef de bureau, la stagiaire pour le vigile du magasin –  voire même comme les élèves avec leur enseignant.
Et comme les enfants de cœur avec le curé…
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(1) C’était le sens retenu par Freud
(2) C’est ce que disait Kant : « Agis de façon telle que tu traites l'humanité, aussi bien dans ta personne que dans toute autre, toujours en même temps comme fin, et jamais simplement comme moyen. » Voir ici.


3 comments:

FRANKIE PAIN said...

je retrouve la plume de votre père et c'est vous Hadrien qui publier j’espère que votre papa n'est qu'en vacances
ce billet est puissant et pose bien les choses
Votre papa a du talent et si c'est vous père et fil ont une très bonne fracture
très cordialement

Jean-Pierre Hamel said...

Merci de votre message chère Frankie.
Effectivement j’étais en vacances et c’est mon fiston qui a eu la gentillesse de mettre en ligne mes propos (il parait que Blogspot permet de déposer un stock-de-Post et les distille jour après jour : je n’ai pas cherché – donc je n’ai pas trouvé).
Bon, je reprends aujourd’hui (29 juin) la souris – et je vais faire incessamment un tour chez vous.
Je vous embrasse chère Frankie
Jean-Pierre

FRANKIE PAIN said...

quand j'ai vu la signature , j'ai eu un frison car le style c'était du copier coller avec le votre. alors c'est là que l'on frisonne et que l'on se rend compte combien l'autre nous est cher et merci de votre mot. d'autant que j'ai vu en oeuvre votre fils par des images d'un premier de l'an c chinois

gros bisous bon retour