Wednesday, February 15, 2006

Citation du 16 février 2006

« Time is money » (« Le temps, c’est de l’argent »)

Benjamin Franklin

La comparaison du temps avec l’argent est bien connue et elle est apparue comme l’expression d’un « fétichisme de la monnaie » puisque c’est Lui qui permet non seulement de mesurer la valeur du travail, mais encore de définir la Nature entière comme marchandise; non seulement d’échanger les produits de son travail avec autrui, mais encore de justifier une éthique de vie (vivre pour produire, produire pour s’enrichir, s'enrichir pour être estimé).

Pour Benjamin Franklin l’équivalence temps/argent est réalisée par une activité particulière (produire, commercer) : ici, le temps c’est seulement de la durée avec ce qu’on peut y faire ; et comme ce qu’on peut y faire peut se payer, alors je peux aussi me payer "du temps" (du « bon temps » même), par exemple en achetant le « temps de travail » d’autrui.

La problématique mercantile de Benjamin Franklin est entendue encore aujourd’hui : on gère le temps comme on gère ses capitaux, on a un compte « capital temps » pour les vacances, on évite de le gaspiller. Comme on a tout de même des doutes, on rajoute des préoccupations morales : comment dépenser son temps avec sagesse ? Que faut-il faire pour vivre sa vie sans perdre son temps ? Que faire de son « temps libre » ?

Demandez au philosophe ce qu’il en pense ; il vous répondra que c’est là l’aliénation de la « créature sans Dieu » (Pascal) qui, pour oublier qu’elle est mortelle, fait comme si elle maîtrisait le temps, comme si elle pouvait rajouter à volonté du temps au temps, un petit bout de durée ici, une RTT là ; comme si le temps n’était pas un écoulement irréversible, comme si cet écoulement pouvait être maîtrisé. Or, on ne remonte pas le cours du temps, on ne peut vivre deux fois. Que le temps soit précieux voilà ce qu’il faut rappeler ; en revanche qu’on puisse l’économiser ou l’épargner comme on épargne son argent, voilà ce qui est absurde.

Que disaient les Grecs ? On dure, on vit, on meurt : la vie se déroule comme le fil de la bobine, et la Parque est là, qui le tranche quand bon lui semble. Point final.

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