« Le diable est optimiste s'il pense pouvoir rendre les hommes pires qu'ils ne sont. »
Karl Kraus, 1874-1936, écrivain autrichien.
Karl Kraus semble croire que le mal est dans l’homme, de sorte que le Diable ne peut l’y introduire. C’est une erreur, car elle est dans l’histoire, comme l’abondamment montré un autre Karl (Marx).
Voici un expérience qui devrait nous aider à y voir plus clair.
Le professeur Philip Zimbardo en août 1971, à l’Université de Stanford, aux Etats-Unis réalise l’expérience suivante : il s’agissait d’explorer les comportements d’individus, considérés comme normaux, placés dans un environnement carcéral. A cet effet, un quartier de détention, plus vrai que nature, avait été conçu dans les sous-sols de l’Université.
Les personnes retenues pour l’expérience, prévue pour durer deux semaines, étaient des étudiants, tous des garçons de bonne famille, issus de la classe moyenne, qui ont été sélectionnés pour leur absence de trouble psychologique. La répartition entre ceux qui tiendraient les rôles de détenus et de surveillants a été laissée au hasard (par tirage au sort). En d’autres termes, les cobayes - car c’est bien de cela qu’il s’agit - ne sont pas des êtres particulièrement violents, ni asociaux, ni dépressifs. En un mot, c’étaient des hommes ordinaires
Dès le deuxième jour de l’expérience, une rébellion a éclaté du côté des prisonniers. Les gardiens, déroutés, ont rapidement laissé libre cours à leur violence, répondant à la révolte des prisonniers par des pratiques d’humiliation et de déshumanisation (coups, brimades, etc.). Le staff des chercheurs a dû alors fréquemment rappeler aux gardiens de s’abstenir de telles pratiques. Mais les pires actes se sont passés au milieu de la nuit, lorsque les gardes supposaient que le staff ne les surveillait plus.
En l’espace de quelques jours, les gardes sont devenus complètement sadiques et les prisonniers, eux, nettement dépressifs et très stressés.
La principale conclusion de l’expérience a été de montrer l’importance des circonstances pouvant altérer les personnalités individuelles : en bref, chacun peut agir comme un monstre, s’il est placé dans certaines conditions. Ce qui se passe à Abou-Grahib ou à Guentanamo représente donc plus une règle qu’une exception.
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