Le blanc sonne comme un silence, un rien avant tout commencement.
Vassili Kandinsky
Curieux d’assimiler le blanc à un « rien », lui qui, en tant que lumière blanche est « tout » - contrairement au noir. Mais si Kandinsky évoque le blanc, c’est sans doute parce qu’il est l’espace indifférencié sur le quel le tableau va naître (1).
Le silence précède donc la manifestation de la parole - ou de la musique - il en est à la fois le contraire et la condition, comme l’espace est la condition de la représentation picturale. Il ne comporte donc aucune signification, celle-ci commençant avec la parole.
C’est ce que l’on contestera à l’aide d’exemples que chacun pourra facilement compléter.
Déjà, il y a la minute de silence, qui est en soi manifestation la plus haute du respect et du recueillement. Le silence dit ce que la parole ne saurait dire ; c’est ainsi qu’on affirme qu’il est un aveu. Bien entendu tous les sentiments dans ce qu’ils ont d’authentiques relèvent plus ou moins de ce mécanisme.
Il y a aussi le silence musical, celui qui se note dans les partitions. Dans un autre registre, il y a celui aussi du public dans la salle de concert ; c’est en particulier le silence qui sépare la dernière note du moment où retentissent les applaudissements. Ces silences-là font partie de la musique, on peut même parler, comme le faisait Mozart à propos de son public de la « qualité » de son silence..
A l’inverse, le silence peut très bien n’être ni la manifestation d’un sens, ni sa condition. C’est ce qu’on relève dans des expressions telles que : « un silence de mort » ; ou « un silence stupide », celui qui ressemble au silence de la bête. A noter que ce dernier n’est pas absence de bruit, puisqu’il peut être accompagné de grognements ou de cris divers.
Alors, le silence est-il néant ? Faut-il plutôt le considérer comme une modalité de la manifestation du sens ? Probablement la vérité est-elle intermédiaire. Si le silence signifie c’est en attirant l’attention sur une autre forme de signifiance qui se passe de la parole.
« Le maître dont l'oracle est à Delphes ne dit pas, ne cache pas, mais signifie. » Héraclite Fragment 93.
(1) Voir l’exemple de Magritte (citation du 19 mars)
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