Le vieux rêve des gens honnêtes : pouvoir tuer quelqu'un en état de légitime défense.
Alphonse Allais
Entre la victime et son assassin, il y a l’épaisseur de la loi. Le second jouit illégalement de la mort du premier qui - s’il le pouvait - en jouirait légalement. La légitime défense est cette jouissance légalisée, et le désir sadique de détruire la vie d’un homme qui souffre habite même les « gens honnêtes ».
D’une certaine manière, la punition du coupable ressemble à cela : plus qu’une vengeance, c’est une jouissance fournie à la victime qui voit souffrir son agresseur. C’est du moins ce que pense Nietzsche, qui rapporte qu’à Rome le criminel était « donné » à la victime (ou à sa famille), qui dès lors pouvait en faire ce qu’elle voulait : le tuer, le réduire en esclavage, le persécuter ou même le libérer.
Pour moi, d’avantage qu’un sentiment sadique, je trouve que ce qui se manifeste ici c’est le désir de toute puissance. La toute puissance, ce n’est pas dominer un élément naturel, par exemple faire sauter un pan entier de montagne en appuyant sur un bouton. Je ne tire aucun plaisir particulier à pousser le volume de la sono ; mais j’aimerais vraiment déchaîner de ma baguette la puissance du Philharmonique de Berlin.
La toute puissance, c’est donc la maîtrise de l’homme, non pas pour le tuer (encore que ce soit une de ses formes), mais pour le faire agir selon sa volonté. Le droit Romain voyait dans cette puissance la plus haute compensation au dommage subi, et la vie du criminel était donc la réparation la mieux adaptée, sûrement pas en tant qu’on la supprimerait, mais justement dans la mesure où elle durerait.
Nous on a inventé les Travaux d’Intérêt Collectif. C’est peu, mais on est sur la voie !
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