Il y a quatre types idéals : le crétin, l'imbécile, le stupide et le fou. Le normal, c'est le mélange équilibré des quatre.
Umberto Eco - Le pendule de Foucault
Ce qui énerve avec Umberto Eco, c’est qu’il recycle en permanence des références puisées dans son immense érudition, sans jamais dire qu’il le fait. C’est ainsi que le Nom de la rose est rempli de pages entières de citations de traités théologiques médiévaux. C’est ainsi qu’il définit ici le normal comme on définit le profil psychologique - équilibre entre des tendances psychiques qui sont pathologiques lorsqu’elles sont prises isolément..
Ce qui choque aussi c’est qu’Eco ne renvoie pas à des tendances psychiques, mais à des données plutôt morales ; quel crédit leur apporter ?
Disons que l’essentiel est de relever que selon Eco, nous tous - nous tous qui nous définissons comme des gens normaux - sommes en réalité pétris de crétinisme, d’imbécillité, de stupidité et de folie. Et même, le parfait crétin n’est que crétin, alors que nous, nous sommes en plus imbéciles stupides et fous : pas de quoi pavoiser…
Je crois en fait que l’intérêt de cette phrase d’Umberto Eco, n’est pas vraiment de constater que la normalité résulte d’un tel mélange. Après tout, on ne voit pas comment un tel amas de carences pourrait hisser l’individu à un niveau de performances supérieur. En revanche on peut admettre qu’il nous engage à plus de modestie : qui sommes-nous pour mépriser ceux que nous jugeons comme inférieurs ? N’avons-nous pas nos carences à nous ?
Et puis aussi, n’y aurait-il pas un monde dans le quel c’est nous - les gens normaux - qui serions les inférieurs et eux les supérieurs ? Il y eut des époques où le crétin bien né était supérieur au génie des mathématiques. Pascal en a même fait un Discours sur la condition des grands (1).
(1) Blaise Pascal : Trois Discours sur la condition des grands (il s’agit du second discours).
No comments:
Post a Comment