Celui qui devient enragé par la morsure d'un chien est excusable, mais l'on a pourtant le droit de l'étrangler.
Spinoza - Lettre à Oldenburg du 7 février 1676 (Pléiade p. 1295)
La justice et le droit, décidément, ce n’est pas la même chose…
Et je ne veux pas supposer que lorsque Spinoza dit « on a le droit de… », il signifie qu’on en a simplement le pouvoir. Non. Le droit signifie, comme le dit Kant, ce qu’on doit vouloir suivant une règle. Et ce qu’on doit vouloir, ici, c’est le bien de la communauté humaine. Et par rapport à ce droit, il est juste d’étrangler l’innocent.
Platon a dit exactement la même chose, avec encore plus de force si c’est possible :
« Tout homme incapable de pudeur et de justice sera exterminé comme un fléau de la société. »
(Platon - mythe du Protagoras). Là, c’est Zeus qui parle, rien moins.
Et Aristote : « [L’homme] est le plus impie et le plus féroce quand il est sans vertu et il est le pire [des animaux] dans ses dérèglements sexuels et gloutons. » (1).
L’homme enragé est donc pire que le chien enragé. Transposez dans notre société. La France, Patrie-des-droits-de-l’homme, Etat-de-droit, croyez-vous qu’elle hésitera le jour où sa tranquillité sera au prix de l’injustice - comme par exemple de faire d’une minorité la responsable de ses malheurs ? Ça s’est vu en tout cas…
Fiat justicia, pereat mundus (2). Comme on le voit, quoiqu’on fasse, il y aura toujours une perte au bout : soit, par pureté, je privilégie les valeurs et alors j’expose mon pays à des troubles et à des crises. Soit, je fais ce qui est le meilleur pour mes compatriotes, quitte à être injuste, et alors ce sont les idéaux de justice qui y passent…
- Mais dites-moi : comment est-ce qu’on sait qu’on homme a la rage ?
(1) Aristote - Les Politiques - (I, 2, )
(2) « Qu’advienne la justice, le monde dût-il en périr ». Ça, c’est l’éthique de la conviction, qui s’oppose à celle de la responsabilité
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