[Le baron d’Holbach à sa femme] - Mais Madame, vos tétons ne me reviennent point.
[La baronne] - Je m’en consolerais bien si j’avais des fesses ; faute de cela je ne saurais aller à cheval sans me blesser et cela est triste.
Cité par Diderot - Correspondance avec Sophie Volland, 15 août 1762
On rejoint, par dessus le siècles, la répartie de Marlène Dietrich, à qui on faisait l’éloge de ses jambes : « Hé bien, voyez-vous, elles me servent principalement à marcher… »
Quelle différence entre le corps fantasmé et le corps réel ? On se limite souvent à des formules vagues comme l’extérieur et l’intérieur, la peau et l’envers de la peau, etc…
On le voit, le corps réel, c’est d’abord un ensemble d’organes, ayant des fonctions précises sans les quelles l’organisme ne pourrait vivre.
Il semble que le fantasme ne puisse s’accommoder véritablement de la représentation de ces fonctions. Chacun le vérifiera facilement par lui-même qans qu’il soit nécessaire d’entrer dans les détails.
Un petit rappel néanmoins : le corps fantasmé peut bien être un corps réel, mais seulement en tant qu’il est vécu comme objet de désir. Il est alors découpé en zones (corps morcelé) et dissocié de toute fonctionnalité organique ; et même l’accomplissement du désir se fait dans l’oubli du besoin sous-jacent (les fantasmes de la libido comme oubli de la finalité de l’acte sexuel).
Dès lors, non seulement le corps réel, avec ses fonctions réelles, cesse d’être significatif (les tétons de la baronne auraient peut-être pu servir encore à allaiter un nourrisson), mais de surcroît, tout rappel à ces fonctions détruit le désir, et détruisant le fantasme.
Une dernière remarque : chacun, comme la baronne d’Holbach, vit directement son propre corps comme corps fonctionnel et non comme objet du fantasme d’autrui. D’où l’incompréhension naturelle où chacun se trouve de comprendre l’attrait que l’amour confère à son corps.
Attrait de l’amour - et aussi bien dégoût de la répugnance… Cette répugnance pour le corps d’autrui est-il lié à la chute dans la fonctionnalité (voir les fesses de la baronne seulement comme ce sur quoi elle peut s’asseoir) ; ou bien s’agit-il d’un nouveau fantasme ?
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