Pour que dans le cerveau d'un couillon, la pensée fasse un tour, il faut qu'il lui arrive beaucoup de choses et de bien cruelles.
Louis-Ferdinand Céline
Ne croyez pas que je rejoigne la misanthropie aigrie de Céline ; on sait où ça l’a mené.
Par contre ce qu’il faut remarquer, c’est que, prenant le cas du « cerveau d’un couillon », il n’a fait que prendre un cas, évident peut-être, mais nullement particulier.
Je ne serais donc pas loin de Céline, et sans doute pas loin de Nietzsche, si je dis : « Pour que la pensée d’un homme quelqu’il soit se mette en mouvement, il lui faut une souffrance, une douleur, ou au moins une inquiétude. »
Principe de moindre action ? Paresse ? Domination du cerveau moyen sur le cortex cérébral ? Disons ça comme on veut, mais je voudrais que cette idée nous aide à comprendre non seulement nos semblables, mais aussi les génies de l’humanité.
Car si la phrase de Céline vise le cerveau d’un couillon, je prétends qu’elle s’applique aussi au cerveau d’un génie.
En fait, sans aller jusqu’aux poètes romantiques qui se sont tous déclarés maudits et en but à des souffrances morales innombrables – souffrances sans les quelles ils ne pourraient écrire : qu’on se rappelle l’Albatros ! – je prends en considérations tous ceux qui ont soutenu que sans une névrose quelconque, l’écrivain resterait silencieux, le peintre ne peindrait pas, le musicien ne composerait plus…
Et pourquoi s’arrêter à de pareils exemples ? Si la pensée de Céline est valable, elle l’est pour tout ce qui d’étend entre le couillon et le génie : c'est-à-dire vous, moi, et toutes nos pensées les plus ordinaires.
Concluons : si vous pensez sans souffrir – d’une façon ou d’une autre – alors vous ne pensez pas vraiment.
No comments:
Post a Comment