Marcel Proust - Sodome et Gomorrhe (p.304)
Alors, on savait déjà que Marcel Proust n’aimait pas le nez, obstacle au baiser ; maintenant il faudrait s’en méfier parce qu’il révèle notre bêtise.
On a récemment évoqué le pouvoir des yeux de dire ou de faire comprendre nos sentiments. Et voilà que nous apprenons que le nez est également un organe expressif.
Comment comprenez-vous ça ? Le nez est parfois associé à des tempéraments (le nez spirituel), ou à une attitude (nez au vent, inquisiteur), ou à des modes de vie (nez rouge de l’ivrogne). A quoi ressemble donc un nez « bête » ?
Il n’est pas si étonnant qu’on arrive à croire qu’il y ait des signes extérieurs de la bêtise humaine, voire même qu’un organe pourrait avoir pour fonction (non exclusive il est vrai) de la révéler. On aime à faire du nez le révélateur de quelque chose : d’une attitude morale - on a ici même évoqué le nez de Pinocchio ; ou bien on fantasme sur la longueur du nez. Ce qui est sûr c’est qu’on le prend toujours comme révélateur de quelque chose : pourquoi est-ce qu’on pourrait détester son nez au point de lui en faire couper un bout ?
Toutefois, outre que la bêtise reste fort relative et qu’elle n’existe peut-être que par le jugement qu’on porte sur nos prochains (voir Post d’hier), ce qui étonne, c’est qu’on puisse croire que l’intelligence ou la sottise puisse se lire sur les visages. Essayez un peu de deviner les diplômes des gens qui passent dans la rue, ou leur métier ; combien de profs de facs auriez-vous classé parmi les bouchers ou les bûcherons (1) ? J'ai eu l’honneur de côtoyer Alain Badiou : il aurait fait un bûcheron canadien très présentable.
(1) Il va de soi que ces métiers sont choisis pour la carrure physique qu’ils supposent et non pour le quotient intellectuel supposé de ces artisans.
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