Il y a sans doute plus dans la littérature russe que dans la vie.
Philip Roth, La contrevie.
J’ai longtemps hésité à utiliser cette citation (merci à P.J de me l’avoir fournie) parce que mes ressources en littérature russe sont absolument élémentaires… Il me reste des choses à découvrir, tant mieux !
Si je la reprends aujourd’hui, c’est en mettant la qualificatif « russe » entre parenthèse, avec votre permission bien entendu.
Gille Deleuze dit quelque part qu’il n’est pas indispensable de voyager, parce que lire peut nous emmener aussi loin. Moi qui vous parle, j’ai visité Rome en lisant : et ce n’était pas le Guide Bleu, mais la Modification de Michel Butor.
Maintenant, Philip Roth veut sans doute dire qu’on connaît mieux la vie après l’avoir découverte dans les romans, et que ceux-ci nous ramènent à la réalité plutôt que de nous en couper comme on le croyait autrefois.
C’est cette réflexion que je me faisais après le scandale récemment dévoilé du mensonge de Misha Defonseca, l’auteur de Survivre avec les loups. Car ce qui déçoit ici (à condition de mettre de côté la tromperie et ses motifs), c’est que cette histoire qu’on croyait vraie se révèle n'être qu'une fiction.
Pourquoi lorsqu’on lit un roman, est-on déçu de constater qu’il n’est que ce qu’il doit être : une fiction ? Pourquoi un tel désir de retrouver un environnement réel, et - plus encore - la vie réelle ? Le roman n’est-il pas là pour nous faire éprouver des passions qu’on ne pourrait jamais espérer vivre, ou des expériences qu’on ne connaîtra jamais, comme de vivre la vie d’un multimilliardaire ?
Mais en fait je crois que le problème n’est pas là. Il me semble que ce que nous voulons, c’est savoir que ces personnages, qui ne vivent pourtant que de ces sentiments que nous vivons pour eux, soient réels, que leur amour, leurs joies ou leurs souffrances soient réelles et non liées à la fantaisie des auteurs : puisque tout cela nous le vivons vraiment par la lecture, alors il faut que ça ait existé vraiment.
D’ailleurs, si on arrive à un happy end, nous sommes heureux de savoir que tout s’est arrangé ; et lorsqu’il y a une suite au roman, nous attendons le volume suivant pour savoir ce qui est advenu des héros. Telle la suite d’Autant en emporte le vent, ou celle des Misérables : que devient Cosette ? Comme si ces personnages de fictions n’étaient pas autant notre produit que celui de leur auteur ; pourquoi est-ce qu’on ne pourrait pas nous mêmes écrire la suite des Misérables ?
Si nous ne le faisons pas ce n’est pas seulement parce que nous ne sommes pas Victor Hugo ; c’est parce que Cosette nous ne la connaissons pas, nous ne savons pas où elle habite, nous ne connaissons personne qui puisse témoigner de sa vie, et que donc nous ne savons pas ce qui lui est arrivé.
Moi je sais ce qui est arrivé à Cosette : après avoir plaqué Marius, elle a racheté l’auberge des Thénardier, et elle s’est mise à son compte
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