Il faut être toujours ivre. Pour ne pas sentir l'horrible fardeau du temps qui brise vos épaules, il faut s'enivrer sans trêve. De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise. Mais enivrez-vous !
Charles Baudelaire – Le Spleen de Paris
Ivre de poésie, ivre de vertu… S’enivrer pour ne pas s’abrutir : voilà le paradoxe développé par cette citation.
Qu’est-ce donc que l’ivresse ?
Définition du T.L.F. :
- Ivresse (Au figuré) : état d'exaltation psychique, provoqué par une passion.
Baudelaire prend acte que la vie réelle – du moins telle que la quotidienneté de l’ordre social nous la donne à vivre – est insupportable à qui dispose d’une conscience aigue de cette réalité.
On peut s’évader de cette réalité en perdant conscience de son existence, soit en perdant la conscience en tant que telle, soit en accédant à la conscience d’un autre monde
Et en effet, celui qui s’enivre de vin finit complètement abruti : il perd la conscience de ce qui l’entoure en perdant complètement conscience.
Mais Baudelaire nous suggère qu’on peut aussi s’enivrer par une surconscience, par un état qui nous permet de nous évader que quotidien et de son insupportable servitude.
Enivrez-vous ! Voilà une injonction qui est un refus absolu du monde qui nous entoure, et en même temps qui refuse de le changer. Autrefois, la jeunesse défilait dans les rues au cri de « Révolution ! »
Aujourd’hui elle attend l’heure de l’open bar.
Notre jeunesse est-elle encore baudelairienne ?
2 comments:
Juste pour savoir, est-ce que le sexe, le cinéma, la marie-jeanne, et les jeux-vidéo ça marche aussi?
Vous évoquez je suppose tout ce qui nous permet de nous évader du quotidien…
Mais imaginez une prisonnier qui creuse son tunnel pour s’évader et qui s’aperçoit qu’il débouche dans la cour d’une autre prison ?
C’est pour dire que, quand on s’évade d’un insupportable quotidien on doit être attentif à l’endroit où nous allons déboucher.
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