Sunday, July 04, 2010

Citation du 5 juillet 2010


[César Borgia utilise Messire Ramiro de Lorca, un "homme cruel et expéditif, auquel il donna les pleins pouvoirs"]

Comme il [César Borgia] avait conscience que les rigueurs passées avaient engendré quelques haines contre lui, afin de purger le coeur de ces populations et de se les gagner en tout, il voulut montrer que si une certaine cruauté avait eu lieu de se manifester, elle n'était pas de son fait, mais celui de la nature cruelle de son ministre [Ramiro de Lorca]. Sur ce il saisit la première occasion, et à Cesena un matin il le fit couper en deux sur la grand-place, avec un billot de bois et un couteau sanglant à ses côtés. La férocité d'un tel spectacle rendit la population à la fois contente et stupide.

Machiavel, Le prince, ch.7 (trad.T.Ménissier)

Nous sommes un certain nombre de citoyens à hocher la tête en nous posant une question : puisqu’il faut économiser l’argent public, pourquoi ne supprime-t-on pas les ministres ?

En effet, nous avons remarqué que Notre-Président, du fait de son hyper-pouvoir, était en réalité à l’origine de tout ce que font les ministres – du moins tout ce qu’ils font de bien, étant entendu que leur autonomie se limite à commettre des gaffes, des erreurs, parfois des indélicatesses. On aurait tout à gagner de leur disparition en les remplaçant par quelques hauts fonctionnaires qui dans leurs bureaux se grattent les fesses d’ennui en attendant l’heure de la retraite.

Mais voilà : Notre-Président a lu Machiavel et il a compris sa leçon : il faut, pour faire passer des mesures très impopulaires, pouvoir en faire porter la responsabilité à des ministres, et puis ensuite donner satisfaction au peuple en les révoquant (1). Ainsi de la réforme des retraites, du gel des salaires et autres joyeusetés que l’été qui arrive recèle encore dans ses flancs.

Le Président doit en effet pouvoir du même geste prouver qu’il n’est pas responsable des réformes quant elles sont désagréables, et en même temps qu’il peut entendre le cri du peuple souffrant pour lui rendre justice.

– Ça, c’est de la politique !

Que ceux qui sont encore sceptiques se demandent pourquoi on nous annonce un remaniement ministériel pour cet automne – et pourquoi le ministre du travail qui fabrique la réforme des retraites à grand coup de machette doit être conservé malgré toute une batterie de casseroles accrochées à ses basques. Le virer maintenant, quel gâchis !


(1) Bien sûr, la coutume barbare de les couper en deux a disparu depuis la révolution française. Mais on la garde sous le coude : on ne sait jamais…

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