Lune 3
Ne te moque pas de ma demeure / La poutre en est inclinée et la chambre petite / Mais la lune qui brille sur la montagne est à moi.
Sin Heum
Voilà une inversion poétique bien classique : nous ne possédons pas réellement ce que nous avons sous la main ; mais ce qui est hors de notre portée nous appartient – c’est même notre seule véritable propriété.
Ma vraie demeure est celle de mes rêves, mes seuls biens sont dans mon imagination et dans mes rêves – non dans la réalité prosaïque.
Et la lune est un support du rêve sans égal.
Si la conquête de la lune a été si passionnante et si décevante à la fois, c’est qu’on espérait voir les astronautes américains fouler un sol que nous connaissions déjà par nos rêves ; découvrir pour de bon les mystères de cet astre si proche et si lointain en même temps…
Et voila la réalité :
- Quand Neil Armstrong, le commandant de la mission Apollo XI est sorti de son module lunaire, tout ce qu’il a trouvé à dire pour commencer consistait à décrire l’état des pieds de l’engin par rapport au sol lunaire : pas très poétique.
- Quand à son second, le pilote Edwin Aldrin, il déclare aujourd’hui que si on le voit sur la vidéo marquer un temps d’arrêt en descendant l’échelle du module lunaire, c’est qu’il voulait satisfaire un besoin naturel avant de poursuive. Et d’ajouter que s’il n’a pas été le premier à marcher sur la lune il a été le premier à y pisser. Là encore, pour la poésie, vous repasserez.
C’est donc à juste titre qu’on s’est complètement désintéressé des missions lunaires et que, si la conquête lunaire redevient le temps d’un anniversaire un sujet prisé dans les médias, c’est parce qu’on a complètement oublié les détails concrets de cette expédition pour se remettre à rêver de l’exploit qu’elle a constitué.
On en est venu à regretter que tout se soit si bien passé au cours de leur voyage : si seulement Apollo XI et Apollo XIII avaient fait une seule histoire, là, oui : ces hommes auraient eu définitivement l’étoffe des héros.
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