Il n'y a pas de si mauvais livre où l'on ne puisse apprendre quelque chose.
Pline l'Ancien
Quiconque aura une seule fois ouvert un livre du genre roman de kiosque de gare, aura du mal à croire Pline l’Ancien (1)
Quoi ? Ces rafistolages de vieilles histoires, ressassées pour satisfaire toutes sortes de jouissances de lecteurs frustrés : il y aurait quelque chose à en retenir ? Il y aurait donc quelque intérêt à les lire ? Il n’y avait donc pas de collection Harlequin (2) du temps de Pline ?
Sans doute…
Mais on peut aussi envisager les choses différemment.
Une digression si vous le permettez : moi qui vous parle j’ai eu l’honneur de déjeuner avec un Inspecteur Général de philosophie (le genre de personnage devant qui on se jette à plat ventre quand il entre dans une classe). Parlant des mauvais professeurs (oui, il en a – hélas) il disait : « Moi ce qui m’intéresse c’est de comprendre ce qu’est l’institution qui leur a permis de devenir professeurs – et de le rester. » Bien vu.
Laissons de côté les lamentations sur l’impuissance de l’administration devant les carences des fonctionnaires. Mais visons plutôt l’idée que tout ce qui existe a bénéficié de soutiens suffisants pour accéder à l’existence et s’y maintenir. C’est une question de sélection naturelle en quelque sorte.
Donc ces mauvais livres, sachez que s’ils s’impriment c’est qu’ils se vendent, et que s’ils se vendent, c’est qu’ils plaisent à certains lecteurs, révélant par là les penchants de leur nature profonde…
Voilà, c’est ça qu’on peut apprendre dans les mauvais livres : découvrir qui sont leurs lecteurs.
Dis moi ce que tu lis, je te dirai ce qu e tu es.
(1) Qui doit à son neveu cet épithète, l’autre étant dit Pline « le jeune »
(2) Cadeau : lisez ici en ligne le Piment de la passion ! Miam !
4 comments:
Doit-on comprendre que l'on peut classer les gens comme ça et raisonner comme en maths :
Bon livre implique bonne personne.
Mauvais livre implique mauvaise personne ?
Et que ces deux ensembles sont des ensembles disjoints (dont l'intersection est l'ensemble vide) ?
"dis mois ce que tu lis..." cette phrase m'inspire! j'ai passé 1 h à vous écrie une bafouille avant de tout effacer!!!
dis moi "comment" tu lis, pourrait préciser le portrait,non?...par exemple la lecture de votre blog n'est pas qu'une "consommation" de lecture dans ma vie, elle me sert à m'interroger, autant sur le fond que vous proposez, que sur la forme!
"dis mois ce que tu lis..."
Récemment dans une salle d'attente, je lis dans un magazine people,une phrase qui me parle; j'ai l'habitude de consigner dans un joli carnet, à joli papier, certaines phrases...il ne s'agissait que d'un vulgaire magazine, et pourtant, pour des raisons qui me sont propres, j'ai trouvé cette phrase trés sage :"mon image vie sa vie, moi je vis la mienne"...d'autres lecteurs n'y auront peut être trouvé aucune valeur à cette phrase!
Moi quand je lis, je cherche de l'aide, de la lumière! voilà ma motivation! je surligne aussi des passages, beaucoup...je ne venère pas l'objet livre, mais suis à la recherche de l'écho...et quand je le trouve, j'ai gagné à lire les lignes ternes qui ont précédées sa lecture! voir parfois les livres ternes avant d'y arriver!!!!
Bref, je chemine...
delphine, qui continue à vous lire assiduement, et qui vient de retrouver du travail (grâce à la lecture du site pole emplois!)
une autre phrase aussi "la lecture c'est comme une auberge espagnole, on y trouve ce que l'on y apporte"
Doit-on comprendre que l'on peut classer les gens comme ça et raisonner comme en maths :
Bon livre implique bonne personne.
- Non, bien sûr. Moi, il y a un tas de gens que je ne peux pas piffer et qui n’ouvrent jamais un livre.
dis moi "comment" tu lis, pourrait préciser le portrait,non?...
- Sans aucun doute ; c’est Barthes qui disait dans « le plaisir du texte », que lecteur cherchait son plaisir dans la lecture et que pour ce faire, il sautait hardiment des passages entiers, relisait compulsivement certaines pages, bref, qu’il utilisait le texte au lieu d’être passivement concentré sur son déchiffrage. Mais bien sûr tout le monde ne se reconnaîtra pas dans ce genre de lecteur.
une autre phrase aussi "la lecture c'est comme une auberge espagnole, on y trouve ce que l'on y apporte"
- Oui, mais on y trouve quand même un peu plus, sinon on ne rechercherai rien d’autre que la confirmation qu’on a raison. Ce qui est un peu court.
Je crois qu’on apporte au texte une mise en perspective par rapport à laquelle il signifie – ou bien il ne signifie rien et on n’y comprend rien.
Le théoricien de l’hypertexte – un certain Ted Nelson – affirmait qu’un texte devait, pour être compris, être complété par tous les autres textes qui en amont de lui, lui conféraient une signification : d’où la technique du lien que nous connaissons bien avec le html.
Reste à dire que ce ne sont pas seulement les autres textes qui soutiennent le sens du texte que nous lisons, mais aussi ce que nous avons appris, ce que nous avons vécu aussi et tout le reste. Mais bien sûr, il y a une limite : l’auteur a forcément pris soin de poser des garde fous qui empêchent de trop modifier le sens de son texte : les contre-sens restent donc possibles.
Toutefois, je crois que l’usage des citations, que nous pratiquons ici consiste à faire sauter ces gardes fous, et à faire dire à peu près ce qu’on veut au texte cité…
P.S. Félicitation pour avoir retrouvé du travail : c’est vraiment une très bonne nouvelle.
Je vous l’avais bien dit : les patrons ont besoin de nous, les travailleurs, pour se refaire de la thune après la crise…
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