Les discours dans notre culture sont du vent avec lequel nous remplissons du vide.
John Kenneth Galbraith – Discours à Washington - 18 Juin 1984
1 – Les discours dans notre culture : de quelle culture parle-t-on ? La notre signifie sans doute celle de notre époque, on vise donc strictement les discours de circonstances, à la tribune d’un Parlement ou devant un parterre de journalistes. Et pas le discours entendu comme une façon ordonnée et méthodique de conduire sa pensée.
2 – Les discours […] sont du vent : ce ne sont que des mots, flatus vocis comme on disait autrefois, des mots qui remuent un peu d’air et c’est tout ; aucune signifiance ; aucune conséquence dans la réalité.
3 – … avec lequel nous remplissons du vide : laissons de coté la question de savoir si on peut « remplir » le vide, et attachons nous à dire de quel vide il s’agit.
Le mots ne peuvent remplir que le vide de notre cervelle, celui de notre pauvre esprit, puisqu’on sait déjà que n’étant que du vent ils ne peuvent rien faire dans la réalité.
Comment remplir un cerveau « vide » ? Par la science ? Sûrement pas s’agissant des discours de notre culture. Mais bien plus sûrement par la représentation de chimères, par l’espoir de voir apparaître ce qui n’existe pas, etc…
Et ne croyez pas que ces merveilles soient seulement l’effet des « discours » : la langue dans son ensemble peut être l’occasion de telles transformation, qui viennent remplacer le réel dans les cerveaux des citoyens.
Selon quelles techniques ?
Il y en a au moins deux qui sont bien connues (1)
- D’abord la « novlangue » selon le terme inventé par Orwell. On peut manipuler la pensée en manipulant le langage. (2)
- La langue de bois. Je sais bien que l’usage excessif de la formule finit par en brouiller la signification (voir par exemple ici). Mais à son origine, je crois bien me rappeler que l’expression "langue de bois" visait à forger une réalité par l’usage répétitif de substantifs (ainsi : la juste lutte du peuple opprimé) : en répétant la même formule indéfiniment on finissait par faire comme si, plutôt que de signifier, elle désignât la réalité.
En réalité la langue de bois ne fait pas que masquer le néant en remplissant le vide des cervelles. Elle sert aussi à désigner le parti – la chapelle – à la quelle appartient celui qui l’emploie.
Car c’est une langue qui est faite exclusivement de dialectes.
(1) Mais bien sûr, toutes les ressources de la rhétorique sont utilisables
(2) Sur la novlangue voir ici. On peut préférer la version originale anglaise : le newspeek
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