Edmond et Jules de Goncourt – Journal littéraire 14 janvier 1861
Les DE Goncourt n’avaient pas la fibre démocrate, ça c’est sûr…
Reste que leur mépris du peuple est établi sur une liste assez précise de griefs : le peuple a besoin de l’amusement (circenses disaient les romains) et des illusions (mensonges, électoraux ou pas). En plus, le peuple est femme, ce qui est tout dire sous la plume des Goncourt.
Je pense que ce jugement des Goncourt appellerait quelques observations pour l’assimiler à notre comportement actuel :
- Certes, nous devrons oublier la mention du « peuple », dont l’emploi est jugé sans doute trop idéologique : aujourd’hui ce n’est pas le peuple qui descend dans la rue, sont les gens – si possibles les petites gens.
- Toutefois, s’il est vrai que la vérité, le sérieux sont de nos jours comme autrefois difficiles à faire entendre, il ne s’agit plus néanmoins de mentir ou de dire vrai aujourd’hui : le mensonge reconnait la valeur de la vérité et il cherche à se faire passer pour elle.
En nous moquant de nos gouvernants, ce que nous voulons désormais, c’est prendre notre revanche sur les puissants en exhibant de façon grotesque leurs travers – et qu’importe que ce soit vrai, pourvu que ça fasse rire.
On parle facilement de la Société du spectacle (Debord) ou de l’entertainment (Mickey), mais ce qu’il faut surtout pointer, c’est que si la dérision et la parodie prennent facilement la place de l’analyse critique de la vie politique, c’est quand même parce que nous allons au plus agréable – et au plus facile.
--> Dans notre société où l’information est partout, où la « vérité » ne peut être cachée bien longtemps, ce qu’il faut c’est la faire oublier, la niveler au niveau de la rigolade, et même qu’elle soit moins attirante que celle-ci.
C’est là qu’on retrouve quand même l’image de la femme des Goncourt : car c’est en termes de séduction que l’information est traitée de nos jours. Que la vérité soit revêche ou grisâtre, et on ne la remarque même plus.
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