Ce n’est pas la rue qui gouverne.
Jean-Pierre Raffarin (en 2003, à l’occasion des grèves contre le projet de réforme des retraites)
Jean-Pierre Raffarin aurait aussi bien pu paraphraser Kant : « Votez tant que vous voudrez, mais – entre temps – obéissez ! ».
Que ça ait pu valoir du temps de Kant, soit. Mais aujourd’hui, la question n’est même plus de savoir si cette affirmation est vraie ou fausse, mais bien à partir de quand elle devient fausse.
Deux exemples :
- En 1995, Alain Juppé alors premier ministre est pris dans une vaste contestation de ses réformes (retraite, sécurité sociale). Il a alors l’imprudence de déclarer : « Je ne bougerai que s’il y a 5 millions de manifestants dans la rue » : il les a eus, et il a du bouger. Reste à lui accorder que, pour une fois, le politique n’a pas usé de la langue de bois.
- En 2006, avec le CPE (« Contrat Première Embauche » réglementant le travail des jeunes) on a vu une loi déjà votée (le 31 mars 2006) être abrogée (le 21 avril de la même année) sous la pression des manifestations. Comment éviter de voir là une forme de démocratie directe, qui s’exprime en dehors des urnes, parfois par les grèves, parfois par les manifestations, parfois par les sondages d’opinion ?
Il faut alors admettre que la légitimité se partage alors entre le gouvernement et les manifestants. Bien que la légalité reste du côté des autorités constituées, néanmoins aucun gouvernement démocratique ne peut tenir face à une contestation massive de la rue.
Mais attention : tout cela vaut en politique, là où il y a des choix à faire. Pas pour l’économie où la dure loi de la nécessité s’applique.
Si vous manifestez contre la pauvreté, c’est seulement parce qu’il y a quelque part des richesses à redistribuer.
1 comment:
Bravo pour ce blog.
Concernant l'économie je pense qu'elle est aussi éminemment politique. Nous en avons la preuve tous les jours. Sans richesse, pas de répartition, c'est sûr. Mais il n'y a pas qu'une seule manière de répartir les richesses. Qu'est ce qu'un budget sinon un catalogue de choix ? L'économie, à la faculté, s'appelle même : économie politique.
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