Une politique qui se borne à brasser des rêves les trompe tous. Une politique qui les ignore se trompe sur la nature de ceux qu'elle prétend conduire.
François Mitterrand – Interview France-Soir - 23 Novembre 1970
Certes, cette phrase est un peu alambiquée, mais pourtant il est rare que le fin renard que fut François Mitterrand s’exprime aussi clairement et avec autant de franchise sur la stratégie des manœuvres politiques.
Car, que dit-il ici, sinon qu’il faut flatter les rêves des électeurs sans compter jamais leur donner une satisfaction – puisque ce sont des rêves ?
La célébration de l’élection de Mitterrand à la présidence de la République, 30 ans après, nous donne l’occasion d’y revenir. L’extraordinaire espoir populaire qui s’est exprimé le 10 mai 1981 portait la marque de l’illusion : celle que les politiques pourraient changer le monde, qu’ils pouvaient faire un monde meilleur – c’est-à-dire un monde dans lequel leurs rêves deviendraient réalité.
1981-1983 : François Mitterrand a offert 2 ans de rêves à la France ; et puis plouf ! Je ne veux pas polémiquer sur le bilan de ces premières années, ni sur la portée véritable des réformes qui ont été pérennisées par la suite (comme la 5ème semaine de congés, ou les 39 heures, etc…) – et d’ailleurs c’est bien ce que dit notre citation : même si ça se paye au prix fort, il y a une part de rêve qui doit être satisfaite. Ce prix s’est appelé « austérité », et ça a été si désagréable que plus personne en politique ne veut employer ce mot depuis.
Concluons.
Il y a deux erreurs qu’un politicien ne doit pas commettre :
- Refuser d’exaucer les rêves des électeurs (du genre : sur le pouvoir d’achat, je n’ai pas de baguette magique (1)).
- Prétendre imposer son propre rêve aux électeurs (du genre : travailler plus pour bling-blinguer plus).
Hélas ! Tout le monde n’est pas aussi maladroit et en France, comme ailleurs en Europe, l’extrême droite s’en tire beaucoup mieux dans ce domaine.
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(1) François Fillon, le 12 mai sur TF1
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