Friday, May 07, 2010

Citation du 8 mai 2010

Nul n’est méchant volontairement.

Platon

Personne, donc, Ménon, ne veut ce qui est mauvais, s'il est vrai qu'il refuse d'en être réduit là. Etre malheureux, en effet, qu'est-ce d'autre que désirer ce qui est mauvais et l'obtenir.

Platon – Menon 78a

N’est-il pas vrai, repris-je, que personne ne se porte volontairement au mal ou à ce qu’il prend pour le mal, qu’il ne paraît pas être dans la nature de l’homme de se résoudre à chercher ce qu’il croit mal plutôt que ce qui est bien, et que, quand on est forcé de choisir entre deux maux, il n’est personne qui choisisse le plus grand, s’il peut prendre le moindre ?

Platon – Protagoras 358 c-d

Nul n’est méchant volontairement.

Précepte moral que bien des apprentis philosophes de la classe de terminale ont ruminé, suite à un sujet de dissertation ou – mieux – à une discussion avec des copains-copines.

Observons donc avec soin et sans pédanterie cette formule. D’abord il semble bien qu’elle soit un résumé de la pensée de Platon plus qu’une formule effectivement écrite. En tout cas on ne la retrouve pas exactement dans les passages où il aborde de sujet (voir citations ci-dessus), et certains contestent même l’usage du terme de méchant, puisque Platon parle de ceux qui recherchent les mauvaises choses, sans qu’on sache s’il s’agit essentiellement des fautes morales. On pourrait dire que ceux qui recherchent ce qui nuit à leur santé recherchent non leur malheur mais leur plaisir (par exemple fumer).

D’ailleurs les petits textes que nous citons montrent qu’on est bien dans une critique de l’hédonisme. Par exemple Socrate explique à Ménon que l’on ne peut vouloir ce qui est mauvais, en employant le syllogisme suivant (dont la majeure manque il est vrai) :

- Ce que tout homme désire c’est d’être heureux.

- Or, ce qui est mauvais rend malheureux.

- Donc on ne peut vouloir ce qui est mauvais.

Mais, la coutume est plus forte que la vérité. La méchanceté morale est bien ce qui nous soucie plus que tout le reste, et plutôt que de se demander si on peut vouloir son propre malheur, on se demande si on peut faire le mal pour le mal (et non pour le plaisir du mal).

Autrement dit, on retrouve la problématique kantienne du mal radical : pour Kant, le mal radical est le penchant à dévier de la maxime de la moralité. Le mal n’est pas voulu comme un bien, mais comme l’opposé de la loi morale. Etre méchant volontairement, c’est une perversion du cœur qui fait vouloir l’opposé de ce que notre devoir nous impose.

Celui qui est absolument et purement méchant a choisi de refuser de faire le Bien pour le bien. Et donc si ce Bien absolu est inaccessible, impensable, alors le Mal absolu l’est également.

Voilà qui réconforte…

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