Monday, May 31, 2010

Citation du 1er juin 2010

L’Angleterre a eu beaucoup de Colbert, mais pas un seul Sully.

Arthur Young – Voyages en France – Année 1788 (Editions Taillandier p. 240)

Permettez que, profitant de la réédition récente en livre de Poche du Journal d’Arthur Young depuis si longtemps épuisé, j’ajoute à la citation déjà faite hier une autre pour aujourd’hui,.

Arthur Young nous renseigne – parfois comme ici sans même le vouloir – sur certains aspects de la France d’ancien régime ; mais il nous renseigne aussi sur celui de l’Angleterre.

Young fait cette réplique à des hôtes français qui s’étonnent en apprenant que son voyage d’étude en France, dans la mesure où il a pour but d’améliorer l’agriculture anglaise, ne soit pas subventionné par le Gouvernement anglais.

– Quoi, lui dit-on, on ne vous paye même pas vos frais de voyages ?

Et Young de répondre que l’argent public en Angleterre finance le développement de l’industrie, mais pas celui de l’agriculture. Ou, comme il le dit : de l’argent pour Colbert mais pas pour Sully.

Je passe sur la différence de traitement entre agriculture et industrie sur laquelle je ne suis pas suffisamment informé. Par contre j’observe qu’en 1788, époque qui nous semble à des années lumière (sans jeu de mot) de nous, les français ont déjà cette certitude : on ne peut faire quelque chose pour le bien public sans subventions publiques. Et qu’à la même époque – déjà – les anglo-saxons quand à eux ne pensent même pas à en obtenir.

Je passe aussi sur la polémique consistant à savoir si cette disposition est une chance ou une malchance : après tout chacun a eu son développement au cours de ces deux siècles écoulés, et nous admettrons que le bilan reste égal en terme de développement économique.

Par contre, ce qui me frappe, c’est la constance des attentes du peuple vis-à-vis du pouvoir politique, c’est l’enracinement dans un passé beaucoup plus lointain qu’on ne pense de nos revendications actuelles.

Comment comprendre l’attachement des français à leur service public, à leur protection sociale – voire même à leur système de retraite – sans cette mise en perspective ?

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